Les Africains sont riches

06.07.2015 22:56

Les richesses d'Afrique
St. Paul dit: vous leur donnez de votre abondance et eux vous donneront de leur abondance. (2 Cor 8,14) Il parle à des hommes riches, les chrétiens en Grêce et Asie mineure pour les convaincre de donner aux pauvres en Palestine. C'était là-bas, en Grèce à cette epoque où on croyait les gens les plus fortunés les plus intelligents. Ils avaient tout, savaient tout et maitrisaient tout. Avec un grand sentiment de supériorité ils regardaient le gens de Palestine, les "gens de brousse", les "sous-developpés".
C'est à peu près ce qui se passe aujourd'hui quand on regarde les Européens, les Occidentaux où, là aussi, on demande souvent des quêtes pour les pauvres. Jusqu'aujourd'hui St. Paul dirait: Vous donnerez de votre abondance et eux donneront de la leur.
Est-ce que nous croyons vraiment qu'il y a des richesses parmi les soit disant pauvres? Est-ce que nous croyons que nous pouvons donner quelque chose ici en Afrique à part des matières premières ou des spectacles touristiques? Tout dépend de votre point de vue.
Au moment où le pape François avec son nouvel encyclique "Loué sois-Tu" est en train de nous réveiller, le monde tout entier est encore impressionné par une "logique technocratique" et consumériste dont on voit bien dépuis longtemps les effets negatifs et derrière laquelle se cache une impasse culturelle et une vraei misère intellectuelle. Il me semble St. Paul a raison. Il y a une autre richesse que la puissance économique et l'abondance de moyens.
Ainsi j'ai commencé ma petite liste des faiblesses occidentales, des choses qui m'étonnent toujours maintenant quand je suis en Europe en regardant, en réfléchissant sur leur manière de penser et d'agir. Après 10 ans en Afrique, je commence à découvrir, parfois couvertes de boue et poussière beaucoup des vraies valeurs humaines très précieuses avec lequelles, peut-être il faut voler au secours d'une humanité qui est en train de se perdre dans des idées et des habitudes qui s'éloignent de plus en plus de la réalité, de la vérité de l'homme et du vrai bonheur.
Ma première découverte était face à la mort, pendant des funérailles que mes paroissiens ont organisé pour le deuxième mari de ma maman décédé en Avril 2015. Les premières années ici j'ai commencé à mépriser un peu ces kermesses avec du bruit et ce gaspillage qu'on appelle funérailles. Jusqu'à ce que ce soit mon tour d'organiser des funérailles. A mon départ pour l'Allemagne j'ai senti une petite obligation. C'est pourquoi j'ai dit: On va fixer le 26. Juin pour une messe demandée pour Hubert. Les autres ont tout de suite compris. A mon retour tout était déjà prêt: les invitations, les quêtes spéciales, les chaises, la bâche pour le parvis de l'église, l'achat d'un boeuf et beaucoup d'autres choses nécessaires pour une cérémonie digne. Le jour même j'ai vu plus que 500 personnes à l'église, dont 10 prêtres qui voulaient me montrer leur soutien et leur affection fraternelle. "C'est pour toi qu'on a organisé tout cela, pour te consoler," était l'explication. Ils comprennent vraiment quelque chose de la consolation ici. L'enterrement en Allemagne, d'ailleurs, s'est déroulé d'une manière plutôt modeste mais quand même digne. C'était plutôt la relation amicale avec Hubert qui a amené une cinquantaine des fidèles à l'église, dont seulement 25 voulurent rester après et prendre un café.
Ici à Solla, on voulait aussi honorer Hubert. Bien entendu il n'était pas mon vrai père, mais cela ne semblait pas important. "Parce que tu as dit que pour toi il était important, nous le fêtons." voici une explication. Et d'ailleurs si quelqu'un meurt à l'âge béni de 78 ans il est presque au rang d'un saint. Je crois qu'il y a là-bas une vraie notion de l'homme. Le départ d'un homme met tout le village en marche. C'est un être humain qu'on va commémorer. Et le passage à la vie éternelle, la vie des ancêtres ceux qui sont le plus sages et font du bien est un moment émouvant où on ne peut pas rester à la maison.
C'est étonnant: La notion de l'homme est plus forte ici en Afrique qu'en Europe. Là où on construit des avions et de gratte-ciel, là où on fabrique des puces électroniques, beaucoup pensent que l'homme est plutôt un tas de poussière dont il ne reste plus beaucoup après son passage sur la terre. Est-ce qu'on réfléchit vraiment sur l'homme ou seulement sur les avions, les puces électroniques, les tôles et les ciments?
Dans cet histoire je vois trois valeurs très précieuses qui sont encore bien présentes ici en Afrique et qui échappent de plus en plus à lEurope même si on en parle quand même:
La solidarité: l'homme n'est pas seulement individu. Il y a des frères et soeurs, des relations personnelles mais aussi naturelles, la relation entre tous les hommes. Il faut vivre cela et fêter cela de temps en temps. Par exemple si quelqu'un est en train de partir. D'ailleurs en Afrique aussi on apprend. Quelques jours après les funérailles j'étais dans un village pas loin de Solla. Dans une maison un homme me salue et accueille chaleureusement. Il dit qu'il a été là lui aussi aux funérailles et ça l'a fait réfléchir: Quelqu'un est mort en Allemagne et nous le fêtons ici, il est aussi notre frère, nous tous sommes des frères. Auparavant nous avons fêté seulement les frères de notre propre famille. On voit bien que la valeur est plus forte que la tradition.
Une autre valeur bien visible: la dignité de l'homme. Ce ne sont pas seulement les déclarations de droit de l'homme qui donne la dignité, mais la célébration de l'homme. Il y a ici tant de rites depuis la naissance envers l'homme. Et le plus important est quand l'homme meurt. On se demande à ce moment: Comment les gens réagissent? Qu'est-ce que signifie cet homme pour eux? Ici tout le village est là. Question d'honneur et question de foi.
Et finalement nous constatons qu'il y a une vraie foi en la vie éternelle: Ici on croit facilement à cette vie de Dieu. Comment est-ce qu'on peut apprécier l'homme sans lui attribuer cette possibilité, cette faculté? La vie éternelle est la concrétisation de la dignité de l'homme. On y voit bien s'il est fait pour la poubelle ou pour Dieu. Il est créé à l'image de Dieu. Il doit avoir une vie impérissable. Une chose qu'on est en train d'oublier dans l'ancien monde chrétien. Si on regarde seulement l'apparence biologique comme en Europe on ne voit rien de ça. Si on regarde l'homme, sa nature et la nature en général on voit bien. C'est comme ça qu'on regarde en Afrique.